Le sexe et la mort dans Les jambes d’Alice de Nimrod

Clément Moupoumbou
Université Omar Bongo Libreville- Gabon

Abstract

The study we present examines the self-feeling of the narrator hero of the novel  Les jambes d’Alice from Nimrod. It is fully displayed when the main character encounters his student Alice on the way of exile, the people of N’Djamena being obligated to leave the city because of the civil war. This new universe that keeps him away from his legitimate wife and daughter has an significant impact on his sexual behavior. The fragmentary nature of the narrative is not only related to the chaos that comes with the context of civil war but also the different states of conscience that the narrative portrays, from the innocent childhood to the years of student , then to the adult years. The novel does not dwell on exposing the nudity of the body, the phantasms and the voyeur behavior of the main character. The study shows, to conclude, that it’s also in the sexual passion that the self-feeling express itself best. It emphasizes the liquidation of the << minimum possible of the state and the international indifference>> by the instigators of civil war in Africa, which is the real purpose is to take advantage ofthe raw materials.

Keywords: Civil war; life; phantasm; sex; self-feeling

Mots clés : Guerre civile, vie, phantasme, sexe, sentiment de soi.

 

En guise d’introduction

Le sexe et la mort[1] est un ouvrage de Jacques Ruffié, qui ressaisit la fable de la tragédie du vivant : « chaque être vivant […] naît, se reproduit, et meurt ».[2] La trajectoire de la vie, du moins chez les êtres complexes, conduit à un constat implacable : « la sexualité va toujours de concert avec un autre phénomène de prime abord catastrophique : le vieillissement et la mort ».[3] La réflexion de de Jacques Ruffié ne s’intéresse qu’au champ bien précis de la biologie.[4] Mais chez les humains, en se répétant, le coït se socialise. Il est donc reconduit au champ de la culture. Pour autant, les formes d’expression du sexe et de la mort investissent des affects qui éprouvent le sentiment de soi chez l’individu.

L’étude que nous proposons entend examiner ce sentiment de soi chez le héros narrateur du roman Les jambes d’Alice[5] de Nimrod. Il se déploie à travers le choix d’un récit débarrassé des contraintes morales, et qui se délecte de « la tentation pornographique ».[6] Nous montrons que le rapport à soi n’est pas une donnée brute établie une fois pour toute. Il s’agit plutôt d’un élément se construit progressivement. Tout au long de la narration, on voit comment le professeur de lycée qui observait une éthique professionnelle vis à vis de ses élèves en vient à entretenir des rapports sexuels avec l’une d’entre elles dans une atmosphère de guerre civile. Nous l’examinons en tout premier lieu à partir du fantasme du corps de la mère. Le lien avec la mère dans l’espace utérin ne relève pas que du seul lien biologique, il est déjà culture et socialisation, en plus de son fondement métaphysique que nous référons à l’étrangeté de la vie. C’est ce que nous voyons en second lieu. Enfin, nous verrons la dimension subversive de ce roman, qui hâte la liquidation des frasques de la françafrique, avec ses guerres de prédations des matières premières en Afrique.     

 

Le fantasme du corps de la mère

La guerre civile à N’Djamena déstructure les liens et les lois qui régissent la société. Les migrations impromptues auxquels les populations sont contraintes en tissent d’autres. Le jeune professeur de français que Nimrod met en scène dans Les jambes d’Alice est le protagoniste d’une aventure qui le conduit vers la périphérie de la ville de N’Djamena. Le corps sculpté d’Alice, notamment les jambes, objet de fantasme de l’enseignant dans la salle de classe où il exerce, sont désormais un puissant aimant qui l’attire et le conduisent comme un somnambule hors du périmètre urbain. La digue que construit le scrupule[7] dans les rapports strictement administratifs entre un enseignant et son élève a sauté, pour laisser se déployer à loisir son imagination, très industrieuse dans les délices de la volupté qui envahissent son esprit. L’amour charnel qui réalise la fusion des corps génère la passion la plus violente et des expériences inédites. La passion actualise l’exil des contraintes des lois du mariage et du devoir paternel. Mais cette passion maladive a finalement son étiologie dans l’enfance.

Il faut partir de la conception freudienne selon laquelle « le désir inconscient tend à s’accomplir en rétablissant, selon les lois du processus primaire, les signes liés aux premières expériences de satisfaction »[8] pour voir comment la relation à la mère chez le personnage central dans Les jambes d’Alice constitue le point de départ du mouvement de lascivité, devenant lui-même le moteur de la narration.  Au niveau de la conscience s’opère le repli, avant que ne s’exécute le mouvement qui consiste à battre en retraite face à l’avancée de la guerre. L’appareil psychique humain a tendance à rejeter les scènes de déplaisir causées le principe de réalité, en l’occurrence l’état de guerre civile qui sévit. Il procède à la résurgence des images d’autosatisfaction. Aussitôt, l’imagination du personnage central, par le truchement du souvenir, organise l’ordre d’apparition des femmes qui lui ont procuré tour à tour le plaisir sexuel, allumé le feu de la passion amoureuse et le désir désire de posséder et consommer le corps de l’autre. Nous avons tout d’abord Maureen, naguère condisciple de classe et désormais épouse légitime du narrateur à son retour définitif au Tchad, retour qui sanctionne la fin de ses études universitaires menées en Europe. Cette évocation permet la réminiscence des amours dans les cités universitaires. La mémoire se cristallise sur un nom, celui de Lucie, rencontrée dans la ville de Pau. Le souvenir commémore la jubilatoire jeunesse ; il migre bientôt vers la tendre enfance. Lieu et période délicats, il en ressort d’abord ces silhouettes gracieuses des filles de la ville de Kim, puis une femme au nom inconnu, mais dont le corps mémorable enclenche des désirs sexuels irrépressibles et motivent la recherche de sortilèges afin de la posséder. Enfin, le désir dévorant de la mère, qui manifeste des tendances de l’inceste. Ce mouvement régressif de la narration qui s’assimile à « la descente à le cave »[9] correspond, d’après Gilbert Durand, à la recherche d’une paix intérieure. Gilbert Durand tire par la suite des parallèles avec l’espace intra-utérin, considéré comme un milieu intime de quiétude et de bonheur. La construction du roman enveloppe ce trajet de descente, voire de descente vers soi, par le chapitre du début qui représente le principe de plaisir, c’est-à-dire la fuite de la mort devenue escapade du professeur de lycée et son élève Alice, et la fin du roman qui renvoie au principe de réalité que représente la guerre.

Jean-Marie Frey a pu écrire que « sans le corps, il n’y a pas de passion ».[10] La passion dans Les jambes d’Alice est en rapport avec le corps, dont les premières expériences remontent à l’espace intra-utérin que caractérise la symbolique amniotique et le lien ombilical. Rapport singulier entre la mère et l’enfant, d’abord en profondeur. Puis, à la surface, cette jointure et cette duplicité des corps assurent la vie par le lait maternel, au moyen d’un organe éminemment érotique : le sein. Gilbert Durand rappelle que « Thétis est fille de tétée »[11], et établit plus loin la relation qu’il y a avec « le langage érotique des mystiques, pour qui l’image du lait est le symbole même de l’union substantielle »[12]. Le passage de la cavité ou du souterrain à la surface n’annihile pas le caractère mystérieux et métaphysique de l’amour, qui sous ses formes subliminales reproduit métaphoriquement le rapport à la mère. Ce rapport se précise au moment où le narrateur est sous emprise des fantasmes déclenchés par la perception du corps d’une passante. Il dit être « en proie au délire », et c’est bien la présence de la mère qui vient l’en délivrer :

Elle se pencha sur mon lit, ses deux mains entourant un bol de bouillon fumant.  Lorsque la vapeur se dissipa, je vis, à son décolleté, les formes qui, dans la rue, gonflaient le corsage de l’amante chimérique. Leur beauté apportait de l’oxygène à mon cœur. « Maman ! maman ! », m’écriais-je. […] Elle posa la tasse de potage et me prit contre sa poitrine. J’avais rêvé de cette accolade ; à vrai dire, je n’y songeais plus à cause de l’ensorceleuse. Le geste de maman me rapatriait dans mon corps. Je regagnais le siège, et il me semblait qu’enfin mes yeux pouvaient voir. La transparence d’une eau bonne, d’une sensation qui était la matrice, refluait en moi. Elle m’avait touché, et tous mes désirs devenaient licites.

  • Mère ! mère ! répétai-je dans un élan amoureux.[13]

 

Aussitôt que la mère procède à l’acte poétique de déclamation d’une berceuse, d’emblée l’enfant s’endort. Le sevrage avait développé un manège de substitution sans nécessairement supprimer le souvenir du bonheur que procure le savoureux breuvage des mamelles. Le manège développé dès l’âge de douze ans consiste à guetter, tous les après-midis et à la même heure, le passage d’une jeune femme et toujours la même :

A douze ans, je guettais tous les après-midi – à l’exception du samedi et du dimanche – les pas d’une jeune dame qui n’était pas tout à fait ronde, mais portait une poitrine généreuse. C’était toujours sur le coup de quatre heures. Elle habitait probablement une rue au-dessus de notre maison. Lorsqu’elle surgissait de l’angle de la route de la Corniche, j’étais subjugué. Je montais sur une dalle d’un caniveau, dit le narrateur, seul piédestal à même de me mettre à la hauteur de ses tétons.[14]

À l’âge de l’adolescence, la vue cède la place au toucher ou, de façon plus précise, se combinent.[15]  Les amours estudiantines lui offrent l’opportunité de la délectation du corps de Lucie. Il répète le rituel en stimulant l’excitation par la caresse. Il passe machinalement le téton de Lucie entre l’index et le pouce. Ce qu’il remarque en premier lorsqu’on lui présente Maureen, ce sont d’abord les seins de la jeune femme.

Il manifeste sa sensibilité à la rondeur des seins et à la poésie, du moins la berceuse de la mère, qui a à la fois un effet curatif et producteur du plaisir. Le tabou de l’inceste opère un transfert sur les corps avenants des autres femmes, autant que se développe, dans le processus secondaire, la sublimation artistique.[16] Cette sublimation est ici le moteur de l’écriture, postérieure aux expériences vécues à l’âge de l’enfance et devient de ce fait « le fantasme inconscient actif dans l’œuvre d’art ».[17] Mais le sentiment esthétique qui s’est déjà éveillé modifie la disposition de réceptivité du corps en accentuant l’acuité du regard, en l’occurrence devenu érotique, et finalement poétique. Comme un avatar du désir réprimé, le regard se met en quête de corps sur lesquels peut s’opérer une jouissance licite.

 

Le corps : l’art au quotidien

Ces corps décrits à travers le souvenir sont aussi des corps de rêve que le langage peint avec les ressources de la poésie. Et c’est au royaume de l’enfance que le narrateur retrouve, par la réminiscence, ces corps à la fois matériaux et producteurs d’art. Le spectacle devant lequel les yeux se délectent est celui des jeunes filles de Kim, bourgade sablonneuse. En effet, pour les jeunes filles, maintenir la propreté de leur peau exige les qualités d’un bateleur ou d’un équilibriste, tant les pieds s’enfoncent très vite dans le sable. Pourtant, selon le narrateur, « la Kimoise foule le sol sans s’y embourber. Terrassière infaillible, elle connaît d’instinct la densité des sols. C’est dire que la Kimoise a le pied léger et, sans être vraiment alerte, lévite élégamment sur la poussière ».[18]  La marche des Kimoises, dit le narrateur, « rappelle le souvenir des pas du Christ sur les eaux »[19]. Le mouvement des corps est comme porté par la grâce qui transforme le banal en merveille. La marche dans ces conditions n’obéit pas seulement au programme génétique de motricité. Elle effectue des mouvements gymniques dont l’harmonie et la beauté créent un écart, désormais une identité ressaisie par le narrateur en une appellation globalisante : les « filles de Kim » ; spécificité par laquelle on les distingue des filles des grandes agglomérations. Les émotions que ces mouvements suscitent favorisent des projections imaginaires dont les pieds sont le ressort. La gratitude du narrateur commande de leur rendre justice : « je leur dois d’entendre mon cœur battre par tous les chemins […]. Soucieuses de faire briller le cuir de leur chair en marche, elles me signifiaient que ce monde avait besoin de gentillesse, de tact et de rêve ».[20]

Cette image spéculaire a forgé un regard soucieux du détail infinitésimal, et son exercice se prolonge jusqu’à l’âge de 27 ans pour le jeune professeur. « Un monde imaginaire, écrit David Le Breton, s’interpose entre les mimiques et les mouvements du corps ».[21] Mais dans le texte, il s’agit de la rencontre entre deux imaginaires. Les jeunes filles du lycée, au cours des rencontres de basket-ball, face à l’adversité imaginent des combinaisons nouvelles qui déroutent les adversaires :

Leurs yeux ardents, yeux d’aveugles, ne se fixaient sur rien de précis, pas même sur l’athlétique bonhomme qui, en criant, les dirigeait. Cependant, je sentais que chacune des directives était mentalement traduite en manœuvre victorieuse. Cette entente me rendait nostalgique d’un accord que n’offraient ni la vie de couple ni, dans ma profession, réunion de toutes sortes.[22]

L’accord entre le corps, l’âme et l’esprit chez ces jeunes basketteuses transforme le jeu en une danse. Le corps en mouvement devenu ballet produit une esthétique dont les pieds, qui sont le ressort dans ce sport, amorcent une élévation qui permet de marquer un panier. Les paniers marqués sont le produit objectif du corps qui se déploie et, grâce à l’imagination, va à la cherche de combinaisons inédites. Mais les paniers sont aussi le produit de la recherche de la satisfaction physique et morale de se transcender et de triompher de l’adversité. Ces « yeux d’aveugles » et même incandescents impriment une partition des mouvements des pieds qui a sa source dans ce que Kandinsky appelle « l’essence intérieure, toute contingence étant par là même éliminée ».[23]  C’est que ces yeux à l’expression ineffable retrouvaient simplement « le procédé des enfants qui sont les plus grands imaginatifs de tous les temps ».[24] Le résultat a alors sur le spectateur des effets inattendus, stimulant par ailleurs son imagination :

La beauté qui exaltait les muscles d’Alice et des autres joueuses rendait nécessaires d’infinies obstinations. Pour ces jeunes filles, il importait de vaincre. Aussi, lorsque leurs lèvres gonflées par le reflux du sang se tournaient vers moi, je ne savais plus si je devais leur adresser des baisers ou m’éloigner en toute hâte pour aller jouir dans les toilettes.[25]

 

Le retour du refoulé

La guerre substitue la loi civile par la loi de l’anarchie. Son contexte exacerbe l’anarchie des pulsions sexuelles. Herbert Marcus[26] faisait déjà remarquer que la plus rebelle des pulsions est la pulsion sexuelle. Alors qu’elle était jusqu’ici endiguée par le scrupule qu’induit le statut administratif de l’enseignant, lequel interprétait la jambe droite d’Alice sortie innocemment sur le couloir de sa rangée comme une barrière infranchissable, la situation devient tout autre en dehors de la salle de classe dans une atmosphère de guerre civile. Les élans du cœur qu’une éthique professionnelle s’ingéniait à différer le passage à l’acte trouve le chemin de satisfaction du désir sur les routes de l’exil. L’attrait du corps de la jeune fille n’a d’égal que la tyrannie du désir. C’est tout naturellement que l’enseignant poursuit les pas empressés de son élève qui se replie dans l’arrière-pays, sans jamais plus se soucier de sauver sa femme légitime et son enfant. Le verrou de la pudeur ayant sauté, c’est à des expériences inédites et audacieuses que le désir enflammé dispose l’amant :

Et pourtant, à ce jour, je n’ai jamais baisé le pied d’une femme. Maureen, mon épouse, n’a pas eu cette faveur, et je doute qu’elle l’ait dans l’avenir. Mon amour ne manque ni de charme ni d’attrait : en revanche, le désir d’impérieuse génuflexion, je ne l’ai vécu qu’avec Alice. Je veux dire : la vue de son pied crée de grandes effusions en moi.[27]

Le corps entrevu au cours des compétitions sportives et reconstruit par l’imagination est parcouru non plus par le regard mais par toute les ressources du toucher. L’expérience de l’amour sexuel est aussi celle du contact des corps qui se découvrent. La guerre qui sème « la mort sale »[28] développe par ailleurs la lascivité. Et c’est sans autre forme de procès que l’élève se donne littéralement au maître :

Ayant étendu Alice, je l’ai explorée par la langue. Après avoir écarté les lèvres de son ouverture, caressé du regard le rose de son velours humide, déjà, je haletais. C’était en raison de son hymen – introuvable, du reste par les ressources de ma sonde. J’aime quand le mystère plane, et l’hypoderme d’Alice en était un. Son anatomie me rendait ignorant de cette région de la femme, ignorant et, néanmoins, confiant : après tout, je n’en voulais rien savoir, soupçonnant la virginité d’être un frein au plaisir. La vue de la petite clé, appendice érectile, me rassure ou, plutôt, m’arrache à toute inquiétude. Contemplant le bel organe, je danse. Un pas qui tangue, une belle transe valent toutes les ivresses du monde.[29]

L’écriture cède bientôt à « la tentation pornographique ».[30]  L’image pornographique dans sa répétition mécanique réifie les corps et les protagonistes, elle « devient dogmatique et symptomatique du meurtre symbolique et de la négation de l’autre »[31]. Or cette évasion dans la satisfaction du désir le plus ardent, et donc la recherche du plaisir, constitue le contrepoids de la psychose d’une mort imminente qu’engendre l’atmosphère de la guerre civile. C’est pourquoi l’écriture se détourne de « l’hyperréel »[32] comme visée propre de la pornographie qui veut révéler ce que l’on cachait alors. La pauvreté du réel est suppléée par la part du rêve :

  • Assieds –toi au bord du lit… […] Ma fébrilité ne lui laissa pas le loisir de la réflexion. Elle s’exécuta, et non sans crainte.

Je m’étais étendu sur le sol tandis que le frêle oiseau me considérait de ses yeux exorbités.

  • Pose ton pied sur mon ventre, pose-le, autrement je mourrai ! […]

Après m’avoir fait languir, Alice a fini par frôler mon ventre. Mon éjaculation fut brutale et saccadée. Elle hurla, en proie à la confusion. Mes yeux s’ouvrirent et je vis la crème qui souillait sa robe. Je n’arrivais pas à détacher mon regard de ce contraste. Alice en fut choquée ; elle pleura.

  • Tu n’es pas bien, mon chéri, tu n’es pas bien, tu me fais peur ![33]

 

Par la frayeur qu’elle enclenche chez Alice, cette scène réintroduit le mystère de la sexualité et révèle ce qu’elle a d’inattendu. Certes, comme l’écrit Jacques Ruffié, « nous sommes les enfants du sexe et de la mort »[34]. Mais l’être humain n’est pas fait pour une « mort distraite ». Et c’est sans doute la critique sourde qu’assène ce roman. Pour Maurice Blanchot, la mort authentique est exactement le contraire de la « mort distraite » : « il y a peut-être deux morts distraites : celle en qui nous n’avons pas mûri, qui ne nous appartient pas ; celle qui n’a pas mûri en nous et que nous avons acquise par violence ».[35] Or l’être l’humain est le seul animal qui fabrique des armes sophistiquées pour donner la mort à son semblable.[36] Et « la mort sale » qu’engendre la guerre est précisément une « mort distraite ». Ce  qu’Achille Bembe dit de la France pourrait être dit de l’Europe, qui « décolonisa sans s’autodécoloniser. […] Car, à s’en tenir à une certaine expérience de africaine, l’un des processus enclenchés au lendemain de la colonisation aura été la destruction tantôt patiente et en sous-main, tantôt chaotique, de la forme d’Etat héritée de la colonisation ».[37] Elle procède au sabotage, à la violence et aux guerres civiles comme exutoire de sa propre barbarie.[38] Dès lors il ne restait plus aux protagonistes du roman qu’à  s’investir dans le champ de la sexualité anarchique, comme une sorte d’ « impératif de nourrir les « réserves de vie » »[39] face au chaos de la guerre civile.  La ville de Laï où ils se réfugient n’a presque plus d’auberge pour accueillir les fugitifs. Il faut ajouter à cela la méfiance des gérants d’hôtel qui doivent s’assurer que ceux qui sollicitent leurs services ne sont à la solde des rebelles. Pourtant, Alice comprend d’instinct que dans ce contexte c’est bien le langage de l’amour qui ouvre même les portes les plus hermétiques fermées:

  • Par quelle invention as-tu séduit cet homme ? demandais-je, tandis qu’Alice me regardait, rayonnante, ses traits transfigurés par les effets de son succès.
  • L’amour, bien entendu, je lui ai parlé d’amour !
  • Tu es folle ?
  • Eh bien oui !

Elle rit. Voyant que je ne comprenais pas, elle amorça une explication.

  • Nous somme à Laï, mon ami, nous sommes au pays de l’amour !

Elle marqua une pause.

  • Les Kabalayes sont des voluptueux, dit-elle. Les mariages, démariages, remariages, en plus des coucheries, ils connaissent. Chacun en ce qui le concerne se doit de répondre, avant tout autre concurrent, au premier frisson d’amour manifesté à l’autre, quel qu’il soit. Vu le contexte, il ne me restait plus qu’à jouer sur les mots, c’est tout.
  • Mais…
  • C’est ahurissant, je sais, renchérit Alice. Il ne faut pas t’en désoler, ce sont les réalités d’ici.[40]

 

La subversion littéraire

D’un point de vue historique, la guerre civile au Tchad débute le 12 février 1972. Le Front de Libération Nationale (FROLINAT) de Goukouni Ouedeï s’oppose aux Forces armées du Nord (FAN) du gouvernement de Malloum. L’implication des troupes françaises – suite à la mort de quatre civils français – puis l’attaque de la maison du premier ministre Hissène Habré soutenu par la Lybie embrase le pays. Le conflit tchado-libyen concerne plutôt le contrôle de la bande d’Aozou ; il s’étend de 1978 à 1987. On estime plus de 75 000 morts pour la première et 7500 morts pour la deuxième.

Pourtant, dans le roman le visage de la guerre n’apparait que dans le récit du capitaine Doubaye. L’évocation de la guerre civile à N’Djamena fait référence en même temps à la guerre tchado-libyenne. Mais on ne voit guère de description de corps mutilés ou de scènes de désastre des obus, etc. Du reste, son récit de la guerre ne couvre qu’un espace intentionnellement réduit.[41] Cette construction fragmentée du roman qui intègre des éclipses ou des omissions voulues n’est donc pas fortuite ; elle orchestre une subversion inouïe :

La persécution donne ainsi naissance à une technique particulière d’écriture et par conséquent à un type particulier de littérature, dans lequel la vérité sur toutes les questions cruciales est présentée exclusivement entre les lignes […] Un homme qui fait intentionnellement une maladresse en écrivant doit être un maître dans l’art d’écrire.[42]

Qu’il s’agisse de de la guerre civile ou de la guerre Tchado-libyenne, leur visée est le contrôle du pourvoir et des richesses. Cet objectif conduit les belligérants à s’équiper des armes sophistiquées et du matériel de pointe qui permettent de répandre la « mort sale » et donc, précisément, celle qui n’est pas la nôtre ou celle en qui nous n’avons pas mûri, qui gâche l’opportunité que tout homme a de « mourir sa mort »[43]. Or il y a chez l’auteur un parti pris pour la vie qui est manifesté par une sexualité débridée, son pouvoir in fine sur la mort. À vrai dire c’est sans surprise que survient un char d’assaut, venant arracher à son idylle le narrateur (homodiégétique) pour le conduire vers le théâtre de la guerre qu’il avait pourtant fui, en fait vers son épouse légitime. « Un feu brûlait en moi, une urgence – et nos corps, hélas, n’étaient plus solidaires »[44], dit le narrateur. Le capitaine Doubaye qui vient le chercher à l’hôtel où il s’était réfugié avec Alice est un ancien condisciple de classe. De la sorte Nimrod fait ressortir les liens de l’amitié et de l’amour, de l’amour familial même, en sus des valeurs de la beauté, de l’art qui parcourent le texte jusqu’à la page 125 (pour un texte qui en compte 140), ainsi que les filles de Kim l’ont appris au narrateur : « elles signifiaient que ce monde avait besoin de gentillesse, de tact et de rêve ».[45]

 

Conclusion

Le roman de Nimrod, Les jambes d’Alice, nous reconduit à ce que Jean-Pierre Cléro appelle « un incroyable enchevêtrement dialectique »[46] de la perception, de l’émotion, du corps, du sentiment de soi et de la pensée puisque qu’« il n’y a pas de sensation ni d’impression sans évaluation préalable. Toute perception, fût-elle la plus originaire, suppose une première activité intellectuelle car jamais aucune sensation n’est donnée ».[47] La perception interne et/ou externe est toujours déjà, in fine, un retour à soi, qui favorise une exploration intime de soi. Nous le ressaisissons par la composante affective de soi du narrateur, qui laisse apparaître la figure d’un homme bouleversé et fragilisé. La prise de conscience de la guerre, au sens d’une appréhension et saisie intellectuelle de l’objet, laisse entrevoir la détresse qui fait suite à l’idée d’une mort imminente et au demeurant violente dans un contexte de belligérance :

Par moments, je ne parvenais pas à oublier que nous étions en guerre, ni que j’avais délaissé mon foyer. Mais cela suffisait-il pour entretenir en moi cette sensation de non-appartenance généralisée ?[48]

L’angoisse de voir son propre corps s’écrouler sous la rafale des mitrailleuses ou décapité à l’arme blanche, penser que les siens qu’on a abandonnés subissent peut-être ce sort, plonge par moment le narrateur dans la dépression. La conscience d’une culpabilité du survivant eu égard à la mort des siens qu’on a délaissés entraine la haine de soi, à qui l’on reproche la lâcheté dans le geste de la fuite. Il s’agit, à la vérité, des sentiments instables qui alternent la haine de soi, la commisération de soi devant la veulerie, puis l’auto-glorification dans l’acte jouissif du coït, donnant le sentiment d’un plein accomplissement de soi.

Dans cet acte éminemment intimiste où la jouissance informe l’agent de l’expression de ses propres affects et le ressenti du partenaire sexuel, il y a pourtant une voie qui nous reconduit au groupe et à l’universalité du genre humain, ainsi que les analyses d’Arthur Schopenhauer le donnent à comprendre :

Ainsi donc, pris dans son ensemble, tout le commerce amoureux de la génération actuelle est, de la  part de toute la race humaine, une grave meditatio compositionis generationis futura, et iterum, pendent innaumerae generationes.[49]Dans cette opération, il ne s’agit pas, comme partout ailleurs, du bonheur et du malheur individuels, mais de l’existence et de la nature spéciale de la race humaine dans les siècles à venir, et par suite la volonté de l’individu s’y exerce à sa plus haute puissance, en tant que volonté de l’espèce.[50]

Certes, il y a une multiplicité de soi dans l’acte de jubilation ou celui de la manifestation de l’angoisse face à des événements heureux ou malheureux, mais il n’est jamais autre chose que l’opportunité de la rencontre avec soi-même.

Le sentiment de soi chez le héros narrateur du roman Les jambes d’Alice[51] de Nimrod se déploie de façon manifeste au moment où le personnage central rencontre son élève Alice sur le chemin de l’exile, les populations de N’Djamena étant contraintes de quitter la ville face à l’avancée de la guerre civile. Cet univers nouveau qui le tient éloigné de sa femme légitime et de sa fille favorise le changement dans son comportement sexuel. Le caractère fragmentaire du récit ne se rapporte pas qu’au chaos qui résulte du contexte de guerre civile mais également aux différents états de conscience dont la narration rend compte, remontant depuis la tendre enfance jusqu’aux années de la vie d’étudiant, puis à l’âge adulte.  Le roman ne rechigne plus à exposer la nudité du corps, les phantasmes et le comportement de voyeur du personnage central. En définitive, c’est aussi dans la passion sexuelle que le sentiment de soi donne la pleine mesure de son expression. L’outrance dans le comportement sexuel du personnage de Les jambes d’Alice est un désir de surabondance de vie, qui tranche avec l’hubris conduisant à a liquidation du « minimum possible d’Etat et l’indifférence internationale »[52] des promoteurs de guerres civiles en Afrique, dont la visée est de faire main basse sur les matières premières.

[1] Ruffié, Jacques, Le sexe et la mort, Paris, Editions Odile Jacob, 2000.

[2] Op. cit. p. 9.

[3] Ibid. p. 11.

[4] L’auteur écrit : « Nous avons délibérément abordé le problème sous l’angle biologique, négligeant son aspect métaphysique qui n’est ni notre domaine ni de notre compétence.», op. cit. p. 12.

[5] Nimrod, Les jambes d’Alice, Paris, Actes Sud, 2001.

[6] Dubost, Matthieu, La tentation pornographique. Réflexion sur la visibilité de l’intime, Paris, Ellipses, 2006.

[7] « Au lycée technique – où j’enseigne depuis trois ans et demi, les mardis et vendredi sont jours de fête. A dix heures quarante-cinq, lorsque l’épiderme des hommes et des choses gonfle, échauffé, irradié, saupoudré par l’étrange langueur du soleil, je retrouve dans le couloir ébloui le pied d’Alice. Elle n’était jamais lasse après la séance d’éducation sportive. […] En général après l’effort physique, elle quittait ses baskets. Elle n’était pas la seule à agir ainsi, et tous les professeurs toléraient cette initiative à cause de la canicule. Alice, au sortir des vestiaires, regagnait la salle des cours le plus souvent déchaussée, ses pieds ruisselaient d’eau tiède. Et, une fois assises, elle étendait son pied droit – le pied d’appel. Tel était l’obstacle que je ne pouvais enjamber, comme il m’est souvent arrivé d’en faire l’expérience sur ces routes où, jadis, veillait le pieu des gardes-barrières. Je m’approchais de son pied mis en travers de ma route, me contentant de tenir la distance : c’est dans cet intervalle que je brûlais ». Nimrod, op. cit. p.12-13.

[8] Laplanche, J. et. Pontalis, J.-B., Vocabulaire de la psychanalyse, Paris, PUF, 1987, p. 121.

[9] Durand, Gilbert, Les structures anthropologiques de l’imaginaire, Paris, Dunod, 1992, p.274.

[10] Frey, Jean-Marie, Le corps épris, Nantes, Editions Pleins Feux, 2005, p. 20.

[11] Durand, op. cit., p. 295.

[12] Ibid.

[13] Nimrod, Les jambes d’Alice, op. cit. p. 125.

[14] Ibid., p.121.

[15] Serres, Michel, Les cinq sens, Paris, Grasset, 1985.

[16] Memmi, Germaine, Freud et la création artistique, Paris, L’Harmattan, 1996, p. 15.

[17] Ibid. p. 8.

[18] Nimrod, Les jambes d’Alice, op. cit., p. 19.

[19] Ibid.

[20] Ibid. p. 21.

[21] Le Breton, David, Les passions ordinaires. Anthropologie des émotions, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 2004, p.282.

[22]Nimrod, op. cit., p.102.

[23] Kandinsky, Du spirituel dans l’art et dans la peinture en particulier. Au cœur de la création picturale, Paris, Editions Denoël, 1969, p.32.

[24] Kandinsky, op. cit. p.62-63.

[25] Nimrod, Ibid., p.102.

[26] Marcus, Herbert, Eros et civilisation, Paris, Editions de Minuit, 1963, p.184 et sv.

[27] Nimrod, op. cit. p. 13.

[28] Thomas, Louis-Vincent, L’anthropologie de la mort, Paris, Payot, 1988.

[29] Ibid., p.34.

[30]  Dubost, Matthieu, La tentation pornographique. Réflexion sur la visibilité de l’intime, Paris, Ellipses, 2006.

[31] Op. cit., p.30.

[32] Ibid., p.19.

[33] Nimrod, op. cit., p.58-60.

[34] Ruffié, Jacques, Le sexe et la mort, Paris, Odile Jacob, 2000, p.11.

[35] Blanchot, Maurice, L’espace littéraire, Paris, Gallimard, 1955, p.153.

[36] Aux plus forts moments de la Françafrique, Loïc Le Floch-Prigent, ancien PDG de l’entreprise pétrolière française Elf, déclarait avec fierté sur la télévision française TF1 qu’il finançait et équipait militairement en même temps l’ancien président angolais José Eduardo dos Santos et les troupes rebelles de Jonas Savimbi au cours de la guerre civile en Angola. Ces aveux sont également rapportés par François-Xavier Verschave (France-Afrique : le crime continu, Survie Editions, p.7.) Pourtant, Nimrod ne choisit pas de parler de ce Noir silence  (titre de l’ouvrage du même Verschave). Mais il fait mention des pratiques: « Nous avons longé le convoi. Loin en arrière suivaient les B, p.M13, ces armes absolues dont les Soviétiques avaient doté les Forces armées tchadiennes, plus communément dénommées FAT. Il y a plus d’un an de cela, les Libyens  – eux aussi équipés par les Soviétiques -, à Faya-Largeau, avec des BM16, avaient écrasés plusieurs centaines de nos soldats », op. Cit. p. 133. Nimrod choisit de monter les pratiques sexuelles audacieuses d’un jeune professeur de français et son élève, qui fuient la guerre, plutôt que de parler de cette « mort sale » des   « Affaires africaines » (Paris, Fayard, 1983).

[37] Bembe, Achille, Sortir de la grande nuit. Essai sur l’Afrique décolonisée, op. cit. p.12.

[38] Lévy, Bernard-Henri, L’idéologie française, Paris, Grasse & Frasquelle, 1981. Voire, du même auteur,  La barbarie à visage humain, Paris, Grasset, 1977.

[39] Bembe, Achille, Sortir de la grande nuit. Essai sur l’Afrique décolonisée, op. cit. p.23.

[40] Nimro, op. cit. p.52.

[41] Cette évocation ne couvre que neuf pages (p. 129-138). 

[42] Strauss, Léo, La Persécution et l’art d’écrire, Paris, Presses Pocket, 1989, p. 58-59.

[43][43] Blanchot, Maurice, L’Espace littéraire, op. Cit. p. 258.

[44] Nimrod, Les Jambes d’Alice, op. cit. p. 129. Ce constat vient confirmer ce que l’intuition d’Alice pressentait déjà : « Lorsque je me fus calmé, elle me dit : « Tu me cherches alors que je suis là. Tu pleures mon absence, et mon corps t’entoure. Tout est donc perdu entre nous ? » – Tu vois, me dit-elle, c’est vraiment fini entre nous. Les tiens te s’emparent de toi dès que tu fermes les yeux, car je suis exclue de ton sommeil », Ibid., p. 100.

[45] Ibid., p.20.

[46] Cléro, Jean-Pierre, Théorie de la perception. De l’espace à l’émotion, Paris, PUF, 2000, p. 23.

[47] Cohen-Halimi, Michèle, « Comment peut-on être « naïf » ? (Une lecture de La Naissance de la tragédie) », in Crépon, Marc (dir.), Nietzsche, Paris, L’Herne, 2000, p. 182.

[48] Nimrod, Les Jambes d’Alice, op. cit. p. 90.

[49] Auguste Burdeau traduit ainsi ce passage : « Méditation sur la composition de la génération future, de laquelle dépendent à leur tour d’innombrables générations ».

[50] Schopenhauer, Arthur, Métaphysique de l’amour sexuel, Paris, Editions Mille et une nuits, 2008, p.15.

[51] Nimrod, Les jambes d’Alice, Paris, Actes Sud, 2001.

[52] Mbembe, Achille, Sortir de la grande nuit. Essai sur l’Afrique décolonisée, Paris, Editions La Découverte, 2010, p.29..    

 

Bibliographie

  • Bataille, Georges, Histoire de l’œil, Paris, Gallimard, 1993.
  • Blanchot, Maurice, L’espace littéraire, Paris, Gallimard, 1955.
  • Boyer, Alain, Kant et Epicure : le corps, l’âme et l’esprit, Paris, PUF, 2004.
  • Cléro, Jean-Pierre, Théorie de la perception. De l’espace à l’émotion, Paris, PUF.
  • Cohen-Halimi, Michèle, « Comment peut-on être « naïf » ? (Une lecture de La Naissance de la tragédie) », in Crépon, Marc (dir.), Nietzsche, Paris, L’Herne, 2000.
  • Dubost, Matthieu, La tentation pornographique. Réflexion sur la visibilité de l’intime, Paris, Ellipses, 2006.
  • Durand, Gilbert, Les structures anthropologiques de l’imaginaire, Paris, Dunod, 1992.
  • Herbert, Marcus, Eros et civilisation, Paris, Editions de Minuit, 1963.
  • Jean-Marie, Frey, Le corps épris, Nantes, Editions Pleins Feux, 2005.
  • Kandinsky, Du spirituel dans l’art et dans la peinture en particulier. Au cœur de la création picturale, Paris, Editions Denoël, 1969.
  • Laplanche, J., Pontalis., J.-B, Vocabulaire de la psychanalyse, Paris, PUF, 1967.
  • Le Breton, David, Les passions ordinaires. Anthropologie des émotions, Paris, Petite Bibliothèque Payot, 2004.
  • Memmi, Germaine, Freud et la création artistique, Paris, L’Harmattan, 1996.
  • Mudimbe, Valentin-Yves, L’Odeur du père. Essai sur les limites de la science et de la vie en Afrique Noire, Paris, Présence Africaine, 1977.
  • Nimrod, Les jambes d’Alice, Paris, Actes Sud, 2001.
  • Onfray, Michel, Théorie du corps amoureux. Pour une érotique solaire, Paris, Grasset, 2000.
  • Quilliot, Roland, Qu’est-ce que la mort ?, Paris, Armand Colin, 2000.
  • Richir, Marc, Le corps. Essai sur l’intériorité, Paris, Hatier, 1993.
  • Ricoeur, Paul, Soi-même comme un autre, Paris, Editions du Seuil, 1990.
  • Sami Tchak, La sexualité féminine en Afrique, Paris, L’Harmattan, 1999.
  • Schopenhauer, Arthur, Métaphysique de l’amour sexuel, Paris, Librairie Arthème Fayard, 2008.
  • Serres, Michel, Les cinq sens, Paris, Grasset, 1985.
  • Strauss, Léo, La persécution et l’art d’écrire, Paris, Presses Pocket, 1989.
  • Serres, Michel, Les cinq sens, Paris, Grasset, 1985.
  • Strauss, Léo, La persécution et l’art d’écrire, Paris, Presses Pocket, 1989.